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Ostracon Deir el-Medînéh
Ostracon IFAO 1813 / ONL 1341
Cet ostracon, d’une taille appréciable (24 x 20 cm), est un tesson de belle poterie rouge à engobe jaune, trouvé lors du déblaiement du grand puits de Deîr el-Médînéh par l’IFAO, lors de la campagne de fouilles de 1949. Sur cet objet fut consigné, à la XXe dynastie, le brouillon d’un texte juridique : le procès-verbal d’une audition de témoins suivie d’un jugement de la qenbet — le tribunal de Deir el-Médineh —, dans un procès civil opposant, pour d’obscures raisons, le dénommé Khonsou à un certain Nékhemmout. Il n’est pas impossible que ces deux personnages soient le père (Nekhemmout) et le fils (Khonsou), qui se succédèrent à la tête de l’équipe de droite des ouvriers de la nécropole thébaine dans la seconde partie du règne de Ramsès III. Le document nous informe que le tribunal donna non seulement raison à Nekhemmout au détriment de son adversaire, mais aussi « à Pharaon » et « aux magistrats de Pharaon » ; c’est-à-dire, très probablement, aux dirigeants de Deîr el-Médînéh.
Sous des dehors séduisants, cet objet offre à celui qui l’étudie un exercice de frustration, puisqu’il est impossible de déterminer avec certitude les tenants et les aboutissants de l’affaire qui y est évoquée. En cela, il est parfaitement représentatif du matériel documentaire de Deir el-Médineh, dont l’interprétation, à moins de recoupements avec d’autres sources, est généralement gênée par l’absence de contexte et des lacunes matérielles. Il s’y ajoute ici le mauvais état de conservation du texte du recto, endommagé par la disparition d’une multitude de micro-écailles, et qui reste d’une lecture difficile malgré l’utilisation de la photographie par infra-rouges (cf. dans cette rubrique, l’article d’Adam Bülow-Jacobsen et Hélène Cuvigny Ostraca lu par infra-rouge).
Ce constat ne doit pas faire oublier que les documents de ce type, en dépit de leurs difficultés d’interprétation, ont contribué et contribuent à la survie miraculeuse du souvenir d’une communauté d’ouvriers qui réalisèrent, il y a plus de 3 000 ans, les tombes royales et princières de Thèbes au Nouvel Empire.
Pierre GrandetImages précédentes:













































































