Institut français
d’archéologie orientale du Caire

IFAO

Manifestations scientifiques

Abonnez-vous à la … Subscribe to the Mailing list :

<< précédente toutes les manifestations suivante >>

Journée d’étude

Le mercredi 22 octobre 2014 (heure du Caire), IFAO géolocalisation IFAO

Les croisades en Egypte. Histoire. Mémoires

Abbès Zouache (CNRS, CIHAM, UMR 5648) et Ahmed el-Shoky (Université 'Ayn Shams)

L’intérêt pour les croisades ne se dément pas. Une définition large du phénomène croisade s’est d’ailleurs imposée parmi les historiens occidentaux, qui ne le circonscrivent plus seulement aux deux siècles d’existence des États latins nés de la première croisade ni à l’Orient. Cependant, la majorité des travaux des spécialistes arabes et occidentaux des croisades portent toujours sur les expéditions qui visèrent à libérer Jérusalem, soutenir les États latins ou s’emparer de l’Égypte.

Ces études témoignent du dynamisme des historiographies arabe et occidentale des croisades orientales. Sans forcément se détacher du « penchant narratif » (Bull et Kempf, 2010) qui caractérise traditionnellement ces historiographies, les chercheurs explorent désormais des champs quelque peu délaissés par leurs devanciers, notamment grâce à l’exploitation de sources manuscrites ou publiées (épopées ou romans arabes, manuels de furūsiyya, projets de croisades...) encore insuffisamment étudiées. Ainsi, dans la lignée d’Alphonse Dupront (1997), les croisades sont désormais plus souvent appréhendées dans le temps long (France, 2005 ; Zouache, 2012), comme un phénomène mémoriel qui marqua les consciences collectives des peuples d’Orient et d’Occident. En particulier, depuis quelques années, l’histoire et les mémoires des croisades tardives font l’objet d’un réexamen (Paviot, 2003 ; Nejedly et Svatek, 2012).

Cette journée d’étude, qui s’inscrit dans la continuité de ces travaux, vise à mieux comprendre, dans la longue durée, l’impact des croisades sur les hommes et les sociétés d’Occident et d’Orient. En réunissant des chercheurs occidentaux et égyptiens, elle a aussi pour objectif majeur de mettre en dialogue des historiographies de la croisade (arabe, occidentale) qui se méconnaissent.

Cette journée d’étude est largement centrée sur l’Égypte, mais s’inscrit dans le cadre plus large du Proche-Orient : aux yeux des croisés eux-mêmes, l’Égypte et le Bilād al-Šām formaient un ensemble peu dissociable. En effet, le contrôle du territoire égyptien devint rapidement la clef de la présence latine en Orient, dans l’esprit des Francs d’Orient comme des puissants d’Occident qui appelèrent à la croisade ou prirent eux-mêmes la croix. C’est d’Égypte, aussi, que les sultans ayyoubides puis mamelouks organisèrent la lutte contre les États latins d’Orient, qu’ils finirent par détruire en 1291.

Au fil des siècles, alors que les côtes égyptiennes et syriennes étaient ponctuellement attaquées par des flottes venues d’Occident puis que les Ottomans se proclamaient à leur tour les chantres du djihad, la croisade ne fut pas oubliée. Même si, en Occident, elle faisait l’objet de vives critiques parmi ceux qui désiraient privilégier un autre type de rapports que guerriers avec les musulmans, des projets de croisades continuèrent à y être rédigés, qui prenaient notamment l’Égypte pour cible. Dans ce pays comme dans l’ensemble du Proche-Orient, une mémoire islamique de la résistance glorieuse à la croisade plus ou moins vivace, selon les contextes, continua à être véhiculée, dont on peut se demander si elle ne détermina pas pour longtemps les relations entre les musulmans et leurs voisins chrétiens.

Références :

‘Awāḍ, M. M., Fuṣūl bībliyūġrāfiyya fī ta’rīḫ al-ḥurūb al-ṣalībiyya, Dār ‘Ayn, Le Caire, 1996.

Dupront, A., Le mythe de croisade, Gallimard, Paris, 1997, 4 vols.

France, J., The Crusades and the Expansion of Catholic Christendom 1000-1714, Routledge, Londres, 2005.

Kempf, D. et Bull, M., « L’histoire toute crue : la première croisade au miroir de son histoire », Médiévales 58, printemps 2010, p. 151-160.

Paviot, J., Les ducs de Bourgogne, la croisade et l’Orient : fin XIVe-XVe siècle, PUPS, Paris, 2003.

Nejedly, M. et Svatek, J. (éd.), Histoire et mémoires des croisades à la fin du Moyen Âge, Méridiennes, Toulouse, 2012.

Zouache, A., « Écrire l’histoire des croisades aujourd’hui, en Orient et en Occident », dans R. Abdellatif et al. (éd.), Construire la Méditerranée, penser les transferts culturels. Approches historiographiques et perspectives de recherche, Oldenbourg, Munich, 2012, p. 120-147.

Intervenants :

M. Aurell, Univ. de Poitiers

J. France,, Univ. de Londres

‘U. Gamal, Université de Sohag

M. F. Rahîl, Société historique d’Égypte

‘Â. M. M. Ramadân, Univ. du Fayyoum

A. el-Shoky, Univ.‘Ayn Shams et Ifao

H. ‘A. el-M. Sulayman, Univ. de Menofia

U. Tala‘at, Univ. du Caire

B. Weber, Université de Toulouse

A. Zouache, CNRS – CIHAM UMR 5648