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Page du Journal de fouilles de Georges Legrain
Page du Journal de fouilles de Georges Legrain. Début de la liste des statues découvertes en 1903-1904, principalement dans la Cachette de Karnak © Musée du Louvre / documentation DAE
Georges Legrain (1865-1917) a marqué l'histoire de l'archéologie égyptienne par ses découvertes et restaurations dans le site de Karnak, dont il fut le chef des travaux de 1895 jusqu'à sa mort. Longtemps réputé perdu, son Journal de fouilles a récemment pu être rendu à nouveau partiellement accessible grâce à la générosité de M. et Mme Roche qui, après l'avoir acquis dans le commerce, en ont fait don au musée du Louvre. Grâce à la coopération de Guillemette Andreu-Lanoë et Vincent Rondot, directeurs successifs du département des Antiquités égyptiennes du Louvre, nous avons pu directement bénéficier des informations fournies par ces documents pour mettre à jour la base de données Cachette de Karnak (Ifao-CSA). Créée en 2006 et publiée en 2009, cette base vise à réunir l'ensemble des données relatives aux objets (statues, stèles, mobilier divers) découverts par l'archéologue français dans une immense fosse aménagée dans la cour du VIIe pylône à Karnak.
Nous avions dû jusqu'alors procéder par déductions et recoupements pour constituer la liste des découvertes auxquelles Georges Legrain avait attribué des numéros "K", marqués en jaune sur les monuments ou épinglés sous ceux-ci dans les photographies anciennes. Or, l'un des dix-huit cahiers acquis par le Louvre et intitulé "Cachette" contient, outre les notes et croquis pris par le fouilleur à partir de la mise au jour de la partie supérieure du dépôt, une liste des 162 objets exhumés entre le 26 décembre 1903 et le 3 avril 1904. D'ores et déjà, cette liste numérotée a permis de compléter la base de données concernant certains objets inconnus ou dont le numéro "K" restait douteux. Cette liste a été créée par Georges Legrain au mois de février 1904 pour mettre de l’ordre dans une découverte dont l’ampleur inattendue rendait le suivi de plus en plus difficile. C’est un inventaire d’objets identifiés par un numéro d’ordre et une description extrêmement sommaire, ce qui montre bien qu’il s’agissait d’abord d’un aide-mémoire pour l’archéologue qui savait très bien ce qu’était « 4. Harmhabi » (B-CK 4) ou « 15. Rannouit » (B-CK 15). Il y a ensuite consigné l’avancement de son travail avec ces mentions d’« estampage » et de « copie » des textes et l’a aussi utilisée comme registre des expéditions au Musée du Caire, qu’évoquent le rappel « Envoyés au Musée » ou les numéros de caisses dans lesquels ces statues était rangées en vue de leur transport. Il s’agit donc d’une source extrêmement précieuse pour notre compréhension de l’histoire des fouilles et du destin des objets de la Cachette.
Laurent Coulon (EPHE) & Emmanuel Jambon (HAdW / IANES, Heidelberg / Tübingen)