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Revêtement en faïence
Revêtement en faïence. Palais de Khourchid-Pacha au Caire, dans Rodolphe Pfnor, Ornementation usuelle de toutes les époques dans les arts industriels et en architecture, Paris, E. Devienne, vol. II, 1867-1868, pl. 130-131 (Paris, Bibliothèque de l’INHA, collections Jacques Doucet).
À l’occasion d’une longue résidence en Égypte entre 1827 et 1844, puis d’une mission scientifique en 1858-1860, l’orientaliste et archéologue Émile Prisse d’Avennes (1807-1879) a constitué une archive visuelle de premier ordre sur l’art égyptien, comme sur l’architecture et l’ornement islamiques et la culture matérielle de l’Égypte contemporaine.
Acquis par la Bibliothèque nationale de France en 1880 à l’instigation de Gaston Maspero, ses papiers ont conservé la trace des techniques de collecte et de reproduction qu’il utilisa au fil des années : estampages, relevés d’architecture, dessins d’ornement aquarellés, croquis pris sur le vif, photographies. Cette documentation a fourni la matière de ses deux grands œuvres : L'Art arabe d'après les monumens du Kaire depuis le VIIe siècle jusqu'à la fin du XVIIIe, Paris, J. Savoy et Cie éditeurs, [1869]-1877 et Histoire de l'art égyptien d'après les monuments, depuis les temps les plus reculés jusqu'à la domination romaine, Paris, A. Bertrand, [1858] 1878 -1879.
Beaucoup d’autres dessins ont été publiés dans des publications généralistes ou en illustration de notices livrées à des périodiques spécialisés. Prisse d’Avennes est ainsi l’auteur d’un œuvre écrit et gravé protéiforme, dont la bibliographie est établie pour la première fois dans Émile Prisse d’Avennes, un artiste-antiquaire en Égypte au XIXe siècle, BiEtud 156, M. Volait (éd.), Le Caire, 2013.
Le dessin de la céramique illustrée ci-dessus parut dans une encyclopédie d’ornement en 1868. Il provient vraisemblablement de la moisson documentaire du second séjour égyptien de Prisse d’Avennes, effectué en compagnie du dessinateur hollandais Willem de Famars Testas et du photographe français Édouard Jarrot. Les notes inédites de Prisse d’Avennes précisent que le palais alors occupé par Kourchid Pacha se trouvait à proximité de l’Azbakiyya. Elles contiennent également la copie d’une mosaïque octogonale ornant l’un des salons de ce même palais.
En opus sectile, le panneau porte une inscription circulaire connue par la brève description écrite et traduction qu’en avait livrées l’orientaliste Jean-Joseph Marcel dans ses Contes du cheikh El-Mohdy parus en 1835. Le texte comporte les noms d’Allah, du prophète Muhammad, des quatre premiers khalifes et des six disciples du prophète. Se revendiquant « artiste » et « antiquaire » (au sens ancien du mot désignant ceux qui étudient les antiquités), Prisse fait ainsi œuvre d’illustrateur et de vulgarisateur des travaux orientalistes conduits sur l’Égypte médiévale. Il indique en outre que la mosaïque est un remploi d’une construction plus ancienne, sujet qui l’avait intéressé dès ses premiers travaux sur l’art islamique égyptien et dont il publia une série d’exemples identifiés dans des mosquées du Caire et de Damiette. C’est par l’acuité de l’observation et la restitution iconographique que les travaux de Prisse d’Avennes demeurent précieux aujourd’hui.
L’iconographie qu’il rassembla sur l’Égypte médiévale et contemporaine est désormais consultable sur la plateforme Gallica. Les notices descriptives des images, ainsi que de ses notes manuscrites, sont en cours de versement dans la base Archives et manuscrits de la Bibliothèque nationale de France.
Mercedes Volait, historienne de l'architecture, directeur de recherche au CNRS