Institut français
d’archéologie orientale du Caire

IFAO

Le corps meurtri dans le Proche-Orient médiéval (VIIe-XVIe siècles)

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Responsables: Sylvie Denoix (historienne, chercheur associé IFAO - chercheur CNRS UMR 8167); Pauline Koetschet (philosophe, arabisante, IFAO); Abbès Zouache (historien, CIHAM - UMR 5648) (Centre inter-universitaire d'études médiévales).

Collaborations: Al-Amin Abou Saada (historien, univ. Tanta); R. Alston (histoire romaine, Royal Holloway, London univ.); Sobhi Bouderbala (historien, IFAO); Agnès Carayon (historienne, doctorante Iremam); M. Eychenne (historien, IFPO); ʿAbd al-'Azîz Ramadan (historien, univ. ʿAyn Shams) ; Cyril Yovitchitch (archéologue, IFPO) ; Abderrahmane Moussaoui (anthropologue, univ. de Provence); Peter Adamson (philosophie ancienne et médiévale, univ. King's College London); Mohamed Bakhouche (littérature arabe, univ. Provence - Iremam); Giuseppe Cecere (spécialiste du soufisme, IFAO); Ahmed Etman (Lettres classiques et Littérature comparée, univ. du Caire); Imane Hamed (lettres classiques, univ. du Caire) ; Peter E. Pormann (Lettres classiques et études gréco-arabes, univ. de Manchester); Anne-Emmanuelle Veïsse (histoire grecque, univ. Paris 1).

Institutions partenaires:

L'ensemble des images que l'on se fait du corps renvoie aux théories philosophiques scientifiques et aux pratiques sociales qui constituent une épistèmé.

Depuis la fin de l'époque umayyade, un milieu scientifique très productif s'est développé dans le monde arabe. Son dynamisme intellectuel en constant renouvellement durant plusieurs siècles a généré un vaste transfert de connaissance du grec vers l'arabe.

Le corps est envisagé ici dans ses multiples dimensions, physiques et psychologiques, qu'il soit sain, malade ou blessé.

La documentation rassemblée (chroniques historiques, textes juridiques, traités médicaux et philosophiques, ainsi que sources archéologiques et iconographiques) et l'analyse que nous en ferons montreront les liens entre l'approche des médecins, des philosophes, des juristes et des historiens de l'époque considérée.

Deux problématiques sont privilégiées:

Les représentations de la santé, de la maladie et de la thérapeutique

Les représentations que l’on se fait du corps sain, de l’altération de la santé et des remèdes à apporter à cette altération à l’époque médiévale dans le Proche-Orient sont multiples. On étudiera les représentations théoriques de la maladie ainsi que leur impact social.

Il s’agit d’abord de réaliser une histoire sociale de la médecine arabe médiévale. Qui sont les acteurs ? Relèvent-ils de milieux sociaux antagonistes et lesquels ? Quelles sont les différentes modalités de professionnalisation des différents courants ? Quelle place la santé et la maladie, en particulier les maladies de l'âme, occupent-elles dans les relations sociales ?

Le corps fait partie d’un système médico-philosophique, partagé par la plupart des médecins et philosophes arabes, dans lequel il est à la fois une partie de la nature et le lieu de l’âme. On considérera donc aussi le corps comme un lieu où se rencontrent médecine et philosophie, sur deux sujets principalement : l'épistémologie et la méthodologie médicale d'une part, les théories de l'âme et de ses rapports au corps d'autre part.

Corps meurtri en contexte de guerre

Les études sur le corps en contexte de guerre à l'époque islamique constituent un domaine pratiquement inexploré. Pourtant les corps sont un des lieux d'expression privilégiés de la guerre : ceux des combattants comme des non combattants. Ils sont à la fois objets de soins, d'admiration, de détestation, de brutalisation et d'outrages. On s'attachera également à la dimension concernant le genre de ces violences.

Toutes les formes de souffrances subies par le corps, qu'elles renvoient à une volonté de l'optimiser (le corps du guerrier est patiemment et violemment modelé à des fins d'efficacité) ou de l'outrager, seront étudiées. La littérature juridique musulmane est ainsi d'une grande richesse quant aux normes à respecter en matière de violences corporelles. Mais on sait que la confrontation avec les sources narratives, plus proches des pratiques réelles, permet de relativiser l’application de ces normes.

Les pratiques en temps de guerre ne sont pas indépendantes des connaissances médicales : à la fois pour soigner les membres de son camp et pour affecter l’ennemi dans son corps même. L’exemple des poisons illustre ce rapport au corps de l’autre qu’il convient d’affaiblir.

Actions et publications prévues:
  1. Plusieurs tables rondes et colloques sont prévus. Les thèmes sélectionnés sont les suivants:
    • La médecine dans l'Égypte médiévale;
    • Les poisons : lecture croisée des traités médicaux et des sources historiques;
    • Corps meurtris: nature bouleversée et intervention humaine (en lien avec les programmes Guerre et Paix au Proche-Orient médiéval et Bains antiques et médiévaux;
    • Les maladies de l'âme, ou l'excès des émotions.
      Ces colloques feront l'objet d'appels à contributions.
  2. Outre la publication des actes de ces manifestations scientifiques, plusieurs ouvrages sont en préparation:
    • un ouvrage collectif sur les "Violences extrêmes en Égypte";
    • un livre, édition de texte d'un médecin égyptien, al-Quṣūnī, proposant une thérapie par le hammam;
    • la constitution d'un corpus sur les maladies de l'âme et d'un autre corpus sur les corps mutilés.
  3. Enfin, un ouvrage collectif en arabe consacré à la construction de la médecine arabe médiévale et à l'histoire des textes médicaux arabes est en préparation, faisant l'objet d'une collaboration entre l'Ifao et l'Institut français du Proche-Orient.
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The battered body in the medieval Near East (7th-16th centuries)

Supervisors: Sylvie Denoix (historian, associate researcher, IFAO - researcher CNRS UMR 8167); Pauline Koetschet (philosopher, arabist, IFAO); Abbès Zouache (historian, CIHAM - UMR 5648) (Centre inter-universitaire d'études médiévales).

Collaborators: Al-Amin Abou Saada (historian, Univ. Tanta); R. Alston (Roman history, Royal Holloway, London Univ.); Sobhi Bouderbala (historian, IFAO); Agnès Carayon (historian, PhD student Iremam); M. Eychenne (historian, IFPO); ʿAbd al-'Azîz Ramadan (historian, Univ. Ain Shams); Cyril Yovitchitch (archaeologist, IFPO); Abderrahmane Moussaoui (anthropologist, Univ. de Provence); Peter Adamson (ancient and medieval philosophy, Univ. King's College London); Mohamed Bakhouche (Arabic literature, Univ. Provence - Iremam); Giuseppe Cecere (specialist in Sufism, IFAO); Ahmed Etman (classics and comparative literature, Univ. of Cairo); Imane Hamed (classics, Univ. of Cairo); Peter E. Pormann (classics and Graeco-Arab studies, Univ. of Manchester); Anne-Emmanuelle Veïsse (Greek history, Univ. Paris 1).

Partner institutions:

The set of images that one makes of the body refers back to theories of the philosophy of science and to social practices that constitute an episteme.

From the end of the Umayyad period, an extremely productive scientific milieu developed in the Arab world. The intellectual dynamism of this milieu, in constant renewal throughout several centuries, resulted in a vast transfer of knowledge from Greek into Arabic

We shall consider the body in all its multiple dimensions, physical and psychological, whether healthy, sick or wounded.

The assembled documentation (historical chronicles, legal texts, medical and philosophical treatises, as well as archaeological and iconographical sources) and the analyses to which they will be subjected will demonstrate the links between the approaches of doctors, philosophers, jurists and historians of the period under examination.

Two lines of enquiry will be emphasised:

Representations of health, of illness and of therapeutics

Multiple representations were made of the healthy body, of health in decline, and of the remedies applied to such a decline during the medieval period in the Near East. We will study theoretical representations of illness as well as their social impact.

Firstly, the task is to draw up a social history of medieval Arab medicine. Who were the actors? Do they reveal antagonist social groups and what were they? What were the different modalities of professionalisation of the different groupings? What place did health and illness, in particular sickness of the soul, occupy in social relations?

The body is seen as part of a medico-philosophical system, shared by the majority of Arab doctors and philosophers, in which it is both part of nature and the holder of the soul. We shall therefore also consider the body as a place where medicine and philosophy meet over two principal subjects: epistemology and medical methodology on the one hand, and theories of the soul and their relationships with the body on the other.

The battered body in the context of war

The study of the body within the context of war in the Islamic period constitutes a domain that is practically unexplored. Nevertheless, the body is a favoured place upon which war expresses itself, whether the bodies of combatants or non-combatants. They are the objects of care, admiration, loathing, brutalisation and outrages. We shall also approach the dimension concerning these types of violence.

All the forms of suffering that the body can be subjected to, whether from the desire to perfect it (a warrior's body is patiently and aggressively modelled to be more efficient) or to abuse it, will be studied. Islamic legal literature is thus a rich source regarding the norms to be respected in the question of corporal violence. However, one knows that a consideration of narrative sources, often closer to real-life practices, will put the application of these norms into perspective.

Practices in times of war are not independent of medical knowledge, both in order to care for members of one's own camp and in order fully to affect the body of one's enemy. The example of poisons illustrates this relationship with the body of the other that one hopes to weaken.

Planned activities and publications:
  1. Several round tables and conferences are planned. The chosen themes are as follows:
    • Medicine in medieval Egypt;
    • Poisons: cross-referenced readings of medical treatises and historical sources;
    • The battered body: nature upset and human intervention (as linked to the programmes War and peace in the medieval Near East and Ancient and medieval baths;
    • Sickness of the soul, or an excess of emotions. 
These conferences will occasion calls for papers.
  2. Aside from the publication of the proceedings of these scholarly events, several other works are in preparation:
    • a collective work on "Extreme violence in Egypt";
    • a book presenting the text of the Egyptian doctor, al-Quṣūnī, proposing hammam therapy;
    • the creation of a corpus on sicknesses of the soul and another on the mutilated body.
  3. Lastly, a collective work in Arabic dedicated to the construction of medieval Arab medicine and to the history of Arabic medical texts is under preparation as part of a collaborative effort between the IFAO and the Institut français du Proche-Orient.